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Story

25 février 2021 — Je viens de m’installer sur le divan, avec un café, pour réfléchir à un passage de l’Évangile quand je l’entends. « Maman, est-ce que je peux avoir encore un peu de lait? » À peine suis-je revenue m’asseoir que retentit une autre petite voix : il faut absolument que je voie le progrès qu’il a fait dans son jeu. Cette heure sainte sonore, assaisonnée de rires et rythmée par les répliques stridentes des dessins animés, est la plus belle de ma journée.

Elle s’intègre aussi à ma retraite de neuf mois, les Exercices spirituels de saint Ignace dans la vie courante. Écrits au 16e siècle, les Exercices se divisent en quatre temps de méditation et de contemplation de la vie de Jésus et de la relation du retraitant avec Dieu. Longtemps appelés « la grande retraite », les Exercices se donnaient sur 30 jours de silence et de solitude. Pas de bruit, pas d’interruptions. Mais saint Ignace a bientôt compris que ce n’est pas tout le monde qui dispose de 30 jours pour s’isoler; il a donc rédigé la 19e annotation qui permet d’étirer les Exercices sur environ un an : c’est ce qu’on appelle les Exercices dans la vie courante.

Spiritual Exercises

Maman de jeunes enfants, habituée à réorganiser mon horaire en fonction des besoins de mes fils, j’apprécie depuis longtemps la flexibilité de saint Ignace. Mais maintenant que le travail et le quotidien de tout un chacun sont chamboulés par la pandémie de COVID-19, j’admire encore plus la sagesse de l’homme qui est désormais pour moi de saint patron de l’adaptabilité.

Normalement, cette retraite dans la vie courante offerte par le Centre de spiritualité ignatienne de notre localité se ferait en personne : une série de récollections mensuelles d’une matinée, complétées par des entrevues avec un directeur spirituel dans un bureau feutré, rehaussé de bougies et d’une œuvre d’art sacré favorables à la contemplation. Mais cette année, la retraite et la direction spirituelle se font par Zoom et j’y assiste depuis mon bureau, qui est aussi ma penderie. Mon heure de prière quotidienne a lieu non pas pendant la période de répit matinale où mes enfants sont à l’école, mais directement en leur présence puisqu’ils étudient à la maison.

À dire vrai, je ne savais pas vraiment si j’y arriverais. Comment entrer dans un espace sacré au milieu du chaos et du bruit de ma vie quotidienne? Comment me concentrer sur Dieu avec toutes ces interruptions?

J’imagine saint Ignace et je le vois sourire. Quel meilleur contexte pour découvrir le fondement de la spiritualité ignatienne, qui nous dit que c’est précisément dans les obligations de notre quotidien que Dieu vient à notre rencontre? Quand je plie les vêtements qui sortent de la sécheuse, Dieu est présent. Quand je lave la vaisselle, Dieu est présent. Dans les voix de mes enfants, Dieu est présent. En rédigeant l’annotation 19, saint Ignace nous a ouvert la voie : il nous permet d’adapter la prière à notre vie affairée, mais surtout, ce qui est peut-être encore plus important, de reconnaître que partout où nous sommes et quoi qu’il nous arrive dans notre quotidien, Dieu est déjà là.

Dans le deuxième temps des Exercices, nous nous efforçons de contempler les événements de la vie de Jésus, en commençant par la Nativité. Quand j’ai entrepris une méditation guidée sur ce tableau sacré avec mon directeur spirituel, j’ai été frappée par quelque chose que je n’avais encore jamais remarqué : le bruit de la Nativité. J’ai entendu l’agitation d’une ville envahie par des visiteurs venus s’inscrire pour le recensement : les cris, les bruits de pas, l’équivalent de nos embouteillages il y a deux mille ans. Dans l’étable, j’ai entendu les braiments de l’âne, entrecoupés par les meuglements d’une vache ou les bêlements d’un mouton. Pour la première fois, j’ai remarqué l’arrivée tonitruante des bergers en fête et l’irruption des Mages, de parfaits inconnus pour Marie et Joseph, mais essentiels à ce grand événement.

(CNS/Katie Rutter)

Nous sommes habitués à imaginer la sainte Nativité dans le silence de la nuit, comme nous le suggère le cantique, mais le bruit et les interruptions ont beaucoup à nous apprendre sur le mouvement et l’action de Dieu dans nos vies affairées. Quand je pense à la prière, j’imagine le silence, un cierge peut-être ou un bouquet de fleurs odorantes sur une table autrement dégagée : une nature morte où Dieu puisse se faire entendre. Mais ce que m’ont appris ces mois tonitruants passés à la maison, c’est que Dieu parle tout aussi distinctement au milieu et par le biais des interruptions, du bruit et de la clameur de mon quotidien que dans le cadre feutré d’une retraite en silence.

La prochaine fois que votre temps de prière ou que votre routine quotidienne seront interrompus, essayez d’accueillir cette intrusion comme le bruit d’un Mage, d’un berger ou d’un animal de la crèche : non pas comme quelque chose qui vous distrait de Dieu, mais comme quelque chose qui vient ajouter à votre expérience de Dieu. Essayez de penser au bruit dans votre vie non pas comme à un barrage routier, mais comme à un portail qui s’ouvre un nouveau sentier, un nouveau point d’observation d’où vous pourrez apercevoir un aspect de la présence de Dieu dans votre vie qui vous aurait échappé autrement.

Alléluia pour ces saintes interruptions. Alléluia pour notre Dieu, Dieu de surprises, qui nous donne la liberté de discerner le sacré dans le quotidien.

Cameron BellmCameron Bellm est une écrivaine de Seattle qui écrit des prières, des poèmes et des textes de dévotion. Après avoir obtenu son doctorat en littérature russe à l’Université de Californie à Berkeley, elle a troqué la vie académique pour la vie contemplative, nourrie par la spiritualité ignatienne et la doctrine sociale catholique. Elle est l’autrice de « A Consoling Embrace » : Prayers for a Time of Pandemic (23rd Publications, 2020). Cameron et son mari ont deux jeunes fils, et, heureusement, le fait de jouer avec des Legos nourrit souvent sa vie spirituelle autant que la lecture du lectionnaire. Vous pouvez la trouver sur cameronbellm.com et sur Instagram, @cameronbellm.

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