Comme ailleurs, beaucoup de choses ont changé ici à Wiikwemkoong depuis le début de la pandémie. L’un des changements est que je n’ai pas pu me rendre à la maison de retraite locale pour les messes hebdomadaires, ce que je faisais auparavant. — P. Paul Robson, SJ
Au sein de la Province jésuite du Canada, les différents apostolats et communautés ont adapté leurs services pendant la pandémie de la COVID-19, notamment en les transférant en partie sur Internet. Cette stratégie peut toutefois laisser une partie des personnes desservies derrière, comme les aînés. En effet, bien que certains aient un accès facile au Web, la mobilité requise ou de l’aide pour réussir à voir les messes en ligne et participer à des activités virtuelles, ce n’est pas le cas de tous. Ainsi, comment le secteur de la spiritualité a-t-il pu continuer à les rejoindre? Comment le contact humain, essentiel pour briser l’isolement, a-t-il pu être maintenu?
Plusieurs jésuites montrent comment ils ont usé de diverses stratégies pour aller à la rencontre des aînés là où ils sont. Les pères jésuites Pierre Côté (Préfet du Gesù), Henk van Meijel (Director of Manresa Jesuit Spiritual Renewal Centre et Director of Rene Goupil House), Wayne Bolton (Associate Pastor, St. Pius X Parish) et Paul Robson (Pastor, Holy Cross Mission) présentent ici leur témoignage, qui pourrait inspirer d’autres secteurs, et ce, même après la pandémie.
Télévision
Comme l’a souligné le P. Côté, les aînés ont pratiquement tous la télévision : c’est un bon moyen de les rejoindre lorsque tout est fermé. « Faut-il ici au centre-ville imaginer un circuit pour diffuser sur la télévision? », s’est-il demandé avec d’autres organisations religieuses de Montréal. L’idée est lancée et fait partie d’une trousse d’outils de communication que le Gesù évalue en ce moment pour rejoindre les fidèles qui avaient l’habitude de se rendre à l’église.
À Wiikwemkoong, la diffusion télévisuelle a déjà été mise en place, et les résultats sont positifs, selon le P. Robson :
Au printemps et en été, avec l’aide du fournisseur local de services de télécommunications FirstTel, les messes dominicales étaient diffusées en continu sur Internet et sur une chaîne de télévision locale. Bien que tous les membres de la communauté ne captent pas cette chaîne de télévision, beaucoup l’ont, et nous avons donc pu nous connecter avec certains aînés qui n’avaient peut-être pas d’ordinateur.
Lorsqu’il est impossible de transmettre virtuellement son propre contenu, les œuvres et communautés jésuites peuvent tout de même proposer aux aînés diverses messes télévisées. Le P. van Meijel souligne en effet que plusieurs jésuites de Toronto et de Montréal y participent. Toutefois, elles « n’ont pas la même touche personnelle que le fait de faire partie d’une congrégation », nuance-t-il.
Courrier
Le courrier est un autre moyen de communication auquel le P. Côté réfléchit. Comme avec la télévision, « il n’y aurait pas d’interaction, mais une action. Une carte qui dit “on pense à toi”, avec une réflexion, pourrait aider. Recevoir du courrier pour un certain nombre de personnes, c’est important. »
C’est ce que le P. Bolton a pu constater à St John :
Nous sommes responsables de deux maisons pour personnes âgées et nous avons envoyé des lettres aux résidents. Le comité du ministère des personnes âgées de notre paroisse a envoyé aussi des cartes de Noël. Richard Mulrooney, SJ, qui enseigne à St. Bon’s, a demandé à ses étudiants de créer des cartes pour les personnes âgées isolées. Ainsi, nous avons envoyé à chaque résident une lettre et deux cartes de Noël.
Téléphone
Pour un contact toujours distancié, mais plus personnel que le courrier et la télévision, plusieurs se sont tournés vers le téléphone, comme le P. Côté. Le P. Bolton explique pour sa part que :
Le P. Smith et moi-même avons téléphoné aux paroissiens, vieux et plus jeunes, pour prendre de leurs nouvelles et savoir comment leurs enfants et petits-enfants vivent avec la pandémie. Ce fut une source d’inspiration, de gratitude et de joie de savoir comment les gens se soutiennent les uns les autres.
Plus à l’ouest, à Manresa, le P. van Meijel explique que les accompagnateurs spirituels rejoignaient les gens, déjà avant la pandémie, non seulement en personne, mais aussi virtuellement et par téléphone. Mais désormais, les visites ont diminué de 90 %. Et lors des appels téléphoniques, la spiritualité n’est parfois qu’un prétexte à une conversation :
Un membre de la communauté a déclaré hier qu’il était surpris. Souvent, les personnes âgées l’appellent pour de l’accompagnement spirituel, mais il ne s’agit généralement pas d’accompagnement spirituel, car elles ont juste besoin de quelqu’un avec qui parler, elles ont besoin d’être entendues dans une conversation sacrée.
Pour de nombreuses personnes, en particulier les personnes âgées, le ministère de l’écoute est de la plus haute importance.
Visites
Ainsi, dans le tourbillon des restrictions et des mesures sanitaires, les visites restent essentielles lorsque permises, comme les bénévoles de Our Lady of Lourdes qui ont contacté et aidé des personnes âgées ou isolées. Ces contacts humains sont nécessaires à la santé mentale, comme le souligne encore le P. van Meijel.
À la maison René Goupil, notre infirmerie à Pickering, la question de la santé mentale est rapidement devenue une priorité après le début du confinement en mars dernier, alors qu’aucun visiteur n’était autorisé à passer du temps avec nos jésuites âgés. Nous avons cependant la chance de bénéficier d’un personnel dévoué et attentionné qui a su identifier les personnes en difficulté et a pu leur accorder une attention un peu plus personnelle pendant le confinement actuel qui, dans de nombreuses maisons de soins, fait défaut en raison du manque de personnel et de ressources financières.
Le P. Robson indique quant à lui qu’il a heureusement pu se rendre quelques fois à la maison de retraite de Wiikwemkoong :
Après un test Covid et un bon résultat (négatif), j’ai pu programmer une visite. Lors de ces visites, nous ne nous réunissions pas pour la messe, mais je faisais le tour et apportais la communion aux gens dans leur chambre.
J’appréciais et je chérissais ces moments avec les aînés.
En conclusion, bien que ce soit parfois difficile, les ministères jésuites cherchent à rejoindre les personnes âgées par divers canaux. Ce travail peut être source de consolation.
Pendant la crise actuelle, j’ai été continuellement touché par le nombre de dons monétaires et de commentaires envoyés par les retraitants, qui attendent avec impatience le moment où nous pourrons à nouveau accueillir des retraites de groupe. La plupart de ces dons proviennent de nos retraitants de plus de 60 ans qui sont confortables financièrement et qui attendent avec impatience les jours où ils pourront à nouveau participer physiquement à une retraite de groupe avec des retraitants partageant les mêmes idées, où les amitiés personnelles pourront à nouveau être approfondies dans notre Dieu d’amour, puisque le contact virtuel n’est qu’un substitut au contact personnel physique réel. — P. Henk van Meijel